(PDF) «Hommes joyeux et terribles, armés de règles à...

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5 besoins de l´industrie. Le laboratoire industriel de recherche devint le symbole d´une nouvelle époque pour l´industrie. Dans le même temps, les connaissances de l´ingénieur évoluèrent. Théories et modèles furent élaborés pour une meilleure compréhension des propriétés et comportements des matériaux et des artéfacts. Ces connaissances avaient une application industrielle directe ou indirecte.10 Il n´est peut-être pas surprenant que les ingénieurs de l´époque se soient vu promis à un brillant avenir. «Le temps et la vie ont connu une mécanisation croissante, et la seule éducation qui réponde entièrement à cette caractéristique de l´époque est celle de l´ingénieur», soulignait-on en 1909 dans Teknisk tidskrift, l´organe des ingénieurs.11 Cette «éducation» avait pris une tournure de plus en plus universitaire au cours du XIXe siècle. Le futur ingénieur n´avait plus besoin – selon un important journal industriel de 1887 – de passer «des années à l´atelier, rivé à l´enclume ou à l´étau, pour devenir un bon ingénieur». Au lieu de cela, il apprenait à présent « dans des établissements spéciaux de formation, sous la direction de savants professeurs... le plus souvent en un mois... plus que ses prédécesseurs n´avaient acquis par eux-mêmes en un an ».12 Ces «établissements spéciaux de formation» étaient les écoles publiques ou soutenues par l´Etat qui, aussi bien au niveau supérieur que secondaire, furent créées aux quatre coins du pays à partir des années 1820. A la différence de ce qui fut le cas dans bien d´autres pays, l´Etat suédois prit la responsabilité non seulement d´assurer son propre recrutement en cadres mais aussi de veiller à ce que l´industrie privée et l´exploitation minière soient pourvues en compétence technique. L´enseignement dispensé dans ces écoles prit de plus en plus un caractère avancé et théorique. Elles devinrent un lieu de passage obligatoire pour celui qui au début du XXe siècle voulait se parer du titre d´ingénieur.13 Le nec plus ultra était d´être «ingénieur civil», ce qui était le cas du tiers environ des 9000 ingénieurs aux alentours de la Première Guerre mondiale. Il fallait d´abord acquérir une formation générale au lycée, puis, malgré la concurrence sévère, être admis à l´Ecole polytechnique royale de Stockholm (KTH) et y accomplir ses études.14 C´était une voie que seul un petit nombre d´hommes avaient la possibilité de suivre; nantis de leur diplôme académique, ils appartenaient à la frange supérieure de la classe moyenne 10 DISCO, Cornelis, RIP, Arie VAN DER MEULEN, B., «Technical innovation and the Universities: divisions of labour in cosmopolitan technical regimes», Social Science Information, 1992, vol. 31, no 3, 465-507; VINCENTI, Walter G., What Engineers Know and How they Know It, London, Johns Hopkins University Press, 1990. 11 Article signé H. N. P. (PALLIN, Hugo Nicolaus), Teknisk Tidskrift 20.2.1909, p. 39. 12 Auteur anonyme, Industritidningen Norden , 18.2.1887, p. 41 sq. 13 BERNER, Boel, Sakernas tillstånd, op. cit ; RUNEBY, Nils, Teknikerna, vetenskapen och kulturen , Uppsala, Almqvist Wicksell International, 1976; TORSTENDAHL, Rolf, Teknologins nytta , Uppsala, Almqvist Wicksell International, 1975. 14 A l´origine utilisé pour désigner les ingénieurs des ponts et chaussées et les ingénieurs hydrographes qui enseignaient à l´école militaire de Marieberg au début du XIXe siècle, le titre d´ingénieur civil devint en 1915 l´apanage de tous les diplômés de KTH, indépendamment de la filière suivie. Dans les données chiffrées sont inclus également les ingénieurs militaires ainsi que les diplômés de niveau universitaire de l´Institut polytechnique Chalmers de Göteborg; formellement, ceux-ci ne furent toutefois appelés ingénieurs civils qu´à partir de 1937. Les autres ingénieurs avaient une formation de niveau secondaire – ce qui constituait aussi une situation relativement privilégiée – ou avaient acquis leur diplôme à l´étranger. Dans le langage courant, le terme d´«ingénieur» était en outre utilisé pour désigner toute personne assumant des responsabilités techniques, sans considération de sa formation théorique. Chiffres